Les possibilités de licenciement pour une entreprise sont strictement encadrées par la loi. Lorsqu’un employeur procède au licenciement d’un employé sans l’existence d’une cause réelle et sérieuse, ce licenciement est abusif. Pour l’employé licencié se pose la question de savoir comment prouver un licenciement abusif.
Table des matières
Le licenciement abusif : un licenciement injustifié, sans cause réelle et sérieuse
Un licenciement est abusif lorsque le motif du licenciement n’est pas valable. La validité du licenciement est appréciée avec la notion de cause réelle et sérieuse, développée par le juge. Le licenciement abusif est donc différent d’un licenciement nul (cas de nullités prévus par la loi) et du licenciement irrégulier (la procédure n’a pas été respectée).
Donc, la notion de cause réelle et sérieuse est tirée de la jurisprudence et non directement du Code du travail. C’est sur la base de cette jurisprudence qu’il faudra s’appuyer pour prouver le caractère abusif du licenciement.
Licenciement nul, irrégulier ou injustifié
Il est important de connaître le problème attaché au licenciement, car les conséquences, notamment les sanctions et indemnités, ne sont pas les mêmes.
Le licenciement nul
Le licenciement nul correspond à un licenciement pour des motifs illégaux ou à l’encontre d’une personne qui est protégée. La loi prévoit les motifs de nullité, qui figurent notamment dans le Code du travail au sein de plusieurs articles. Voici quelques exemples de nullité :
- Licenciement sur la base d’une discrimination (articles L. 1132-1 à L. 1132-4 du Code du travail) ;
- Licenciement lors d’une grossesse ou d’un congé maternité (articles L. 1225-4 et L. 1225-5 du Code du travail)
- Licenciement sans prendre en compte le respect du droit de grève (article L. 2511-1 du Code du travail)
Le licenciement irrégulier
Le licenciement est irrégulier lorsque la procédure n’est pas respectée. Par exemple, l’employeur n’a pas respecté les mentions obligatoires dans la convocation à l’entretien préalable (défaut d’adresse pour l’entretien par exemple) ou les délais avant et après l’entretien préalable au licenciement. Pour un licenciement irrégulier, il n’y a pas de remise en cause du licenciement, mais l’ancien salarié peut prétendre à des indemnités en réparation du préjudice subi.
Le licenciement injustifié
Enfin, le licenciement abusif correspond au licenciement injustifié. C’est-à-dire que sa cause n’est pas nulle, mais elle n’est pas justifiée pour le juge. Pour le licenciement injustifié, il n’y a normalement pas d’erreur de procédure, mais un licenciement injustifié peut également être irrégulier. Dans ce cas, seule l’indemnité pour licenciement injustifié sera versée.
Le licenciement abusif repose donc sur l’absence d’une cause, qui n’est ni réelle ni sérieuse. L’absence de motif est nécessairement un licenciement abusif.
L’absence de cause réelle du licenciement abusif
Le licenciement est qualifié d’abusif, lorsqu’il est dépourvu d’une cause réelle. Une cause réelle est donc un motif :
- qui existe et est exact, c’est-à-dire vérifiable et précis ;
- objectif ;
- qui ne cache pas un autre motif, comme la suppression du poste.
Ainsi, l’absence de cause réelle peut se retrouver dans une décision prise par l’employeur sur la base de soupçons, comme de simples soupçons de vol par exemple.
L’absence de cause sérieuse du licenciement abusif
Que le motif existe n’est pas suffisant. La cause doit également être sérieuse. Donc, le motif invoqué par l’employeur doit être suffisamment grave pour ne pas constituer un licenciement abusif. Certains motifs pouvant a priori être perçus comme graves ont été appréciés différemment par le juge, comme la question des retards de l’employé ou encore le vol.
Exemple 1 : le cas des retards
Un employé qui commet un retard n’est pas nécessairement considéré comme une cause sérieuse. Il faut donc regarder la gravité du retard pour justifier un licenciement.
Par exemple, un employé reçoit un avertissement pour une série de retards. Un an et demi plus tard, son employeur constate un retard de quelques minutes, et procède au licenciement. Ici, la cause du licenciement, un seul retard de quelques minutes, n’est pas un motif grave. Le licenciement se base uniquement sur ce retard, les retards précédents ayant déjà été sanctionnés et étant espacés dans le temps, et le retard n’étant que de quelques minutes. Le licenciement est donc abusif.
Autre cas, le retard d’une journée lors d’un retour de vacances. Un employé tombe en panne de voiture lors d’un trajet de retour de vacances, et prévient son employeur qu’il ne pourra pas être présent pour son jour de reprise. L’employeur le licencie pour un retard d’une journée, sans préavis pour faute grave. Ici, il ne s’agit pas d’une faute grave, car l’employé a prévenu son employeur, et ne pouvait pas faire autrement. Le licenciement est abusif, car dépourvu de cause sérieuse.
Exemple 2 : le cas du vol
Autre exemple de motif a priori sérieux, le cas du vol par un employé. Le vol va s’apprécier au regard de la valeur marchande, et donc de la gravité de l’acte pour l’entreprise.
Une employée récupère des denrées périssables, qui sinon vont être détruites. L’employeur procède au licenciement pour faute lourde. La valeur marchande totale du vol est de moins de 100 euros. Dans ce cas de jurisprudence, le juge a estimé, en raison de la faible valeur marchande et de l’ancienneté de l’employée sans aucun antécédent, que ce vol ne constituait pas une faute lourde. Le licenciement était sans cause réelle et sérieuse et donc abusif.
Comment prouver le licenciement abusif
En cas de licenciement abusif, deux choses sont capitales :
- Agir rapidement
- Rassembler les preuves
Rassembler les preuves rapidement
Des délais de départ parfois courts
Suivant votre situation, le délai entre la convocation à l’entretien préalable au licenciement et le départ effectif peut être très court. Par exemple, un licenciement pour faute grave ou faute lourde entraîne le départ immédiat du salarié de l’entreprise. Les délais pour la lettre de convocation à l’entretien et pour la lettre de licenciement s’appliquent, mais le salarié n’aura pas nécessairement accès à son poste de travail.
L’employeur peut également décider d’une dispense de la période de préavis. Le salarié ne peut pas s’opposer à cette dispense, mais il recevra une indemnité compensatrice de la part de l’employeur en échange.
Donc, même si un licenciement est une situation est compliquée pour l’employé, il faut agir rapidement pour rassembler les preuves d’un licenciement abusif.
Les preuves à rassembler pour prouver le licenciement abusif
C’est à l’employé de prouver le licenciement abusif. Il peut utiliser tout moyen de preuve, car la preuve est libre devant les prud’hommes.
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Ainsi, l’employé licencié de façon abusive va pouvoir transmettre tous les documents utiles, échangés dans le cadre de son travail. Le juge a admis qu’il était possible pour le salarié de recueillir des preuves, par exemple en photocopiant les documents de l’entreprise, pour une défense devant les prud’hommes.
Prudence toutefois pour les documents protégés par le secret professionnel, et les documents contenant des éléments de vie privée des autres salariés.
Exemple 3 : réunir les preuves pour sa défense devant les prud’hommes
Un salarié apprend que son licenciement est imminent. Pour lui, le licenciement qui se prépare est abusif, car basé sur une détérioration des résultats de l’entreprise, alors qu’il n’est pas responsable de cette détérioration. Pour prouver que le licenciement sera abusif, il transfère des documents internes à l’entreprise vers son ordinateur personnel.
Une fois le licenciement acté par l’entreprise, et contesté par l’employé, l’entreprise apprenant le transfert des documents, attaque l’ancien employé pour vol et abus de confiance.
Ici, les documents transférés servent exclusivement à la défense de l’employé contre le licenciement abusif, devant le conseil des prud’hommes. Il s’agit d’un moyen de preuve, accepté, et le juge pénal ne contrôle que la relation entre les pièces et les droits revendiqués par le salarié. Il ne s’agit donc pas d’un vol, et l’employeur ne pourra obtenir qu’un non-lieu.
L’action auprès des prud’hommes
Avant de saisir les prud’hommes, il est fortement recommandé de demander l’assistance d’un avocat (qui n’est pas obligatoire devant les prud’hommes) ou d’un spécialiste, notamment pour l’entretien préalable au licenciement. L’avocat pourra assister l’employé licencié abusivement pour réunir les preuves, négocier avec l’employeur, ou encore effectuer les démarches nécessaires auprès du conseil des prud’hommes.
Le salarié dispose d’un délai d’un an pour contester le licenciement. Ce délai commence à partir de la date de notification de la rupture du contrat.
Il faut s’adresser au conseil des prud’hommes du lieu de travail ou du domicile du salarié. Le salarié doit déposer une requête au greffe du conseil des prud’hommes, avec :
- L’objet de la demande,
- Les coordonnées du salarié,
- Les coordonnées de l’employeur,
- L’explication sommaire des motifs de la demande (avec les résolutions demandées, notamment les sommes réclamées).
Le règlement à l’amiable
Le bureau des conciliations du Conseil de prud’hommes procède d’abord à une tentative de règlement à l’amiable. Cette phase est obligatoire, et se fait sans consultation du juge.
Si un accord est trouvé, le règlement à l’amiable permet d’éviter une procédure plus longue et coûteuse. Si aucun accord ne ressort de cette phase, le salarié et l’employeur passeront devant le juge.
Le règlement judiciaire
C’est une fois devant le Conseil des prud’hommes que le salarié apporte les preuves du caractère abusif de son licenciement.
Si le juge estime que le licenciement est bien abusif, il détermine ensuite les sanctions applicables à l’employeur
Les sanctions du licenciement abusif
Les sanctions sont différentes en fonction de la taille de l’entreprise et de l’ancienneté du salarié.
La réintégration du salarié au sein de l’entreprise
Le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l’entreprise. Cette réintégration se fait avec le maintien des avantages acquis avant le licenciement.
En cas de refus de la réintégration, par le salarié ou par l’employeur, l’employeur devra verser une indemnité à son ancien employé. Cette indemnité est déterminée en mois de salaire brut, selon une grille qui comprend l’ancienneté du salarié, une indemnité minimale et une indemnité maximale.
Les grilles de calcul
Il existe deux grilles de calcul, suivant la taille de l’entreprise. Les entreprises plus petites bénéficient d’une indemnité à verser moins importante que pour les moyennes et grandes entreprises. La distinction se faite entre :
- Les entreprises de moins de 11 salariés,
- Et les entreprises de 11 salariés et plus.
Le salarié peut effectuer une simulation de cette indemnité grâce à un calculateur en ligne.
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