👉 Vous hésitez entre tutelle et curatelle pour protéger un proche ? Maître Serezo vous explique tout.
Table des matières
Nombre de curatelles et tutelles en France
L’article 425 du code civil dispose que lorsqu’une personne est dans l’impossibilité de pourvoir seule à ses intérêts en raison d’une altération de ses facultés mentales ou corporelles, elle peut bénéficier d’une mesure de protection juridique.
Ces mesures sont nombreuses. Il en existe des non judiciaires (habilitation familiale, mandat de protection future) et des judiciaires. Parmi les mesures de protection judiciaire, celles qui sont le plus fréquentes sont la tutelle et la curatelle.
Ainsi, en 2022, pour 62 598 mesures ouvertes par le juge des tutelles, les tutelles et curatelles représentaient plus de 98 % des mesures ouvertes (52% de curatelles et 46% de tutelles)[1].
Ces deux mesures obéissent toutefois à des logiques bien différentes. Il convient de les présenter afin de guider les majeurs protégés et leurs proches.
Curatelle: la personne est assistée et contrôlée
L’article 440 du code civil dispose que « La personne qui, sans être hors d’état d’agir elle-même, a
besoin (…) d’être assistée ou contrôlée d’une manière continue dans les actes importants de la vie civile peut être placée en curatelle ».
La curatelle est une mesure de protection pour les personnes dont l’état de santé ne les empêche pas d’agir mais nécessite l’assistance ou le contrôle d’un tiers pour la réalisation des actes importants de la vie.
En d’autres termes, la curatelle est une mesure d’assistance et de contrôle du majeur protégé.
S’en suit une répartition entre les actes que le majeur sous curatelle peut réaliser seul et les actes qui nécessitent l’assistance du curateur :
- S’agissant des actes d’administration et des actes conservatoires – c’est-à-dire ceux qui sont les moins graves (payer une facture, réaliser une démarche administrative, réparer un bien, etc.) –, le majeur sous curatelle peut en principe les accomplir seul, sous le contrôle du curateur.
- S’agissant des actes de disposition – c’est-à-dire ceux qui sont plus importants (vente d’un appartement, réalisation d’une donation, etc.) – le majeur sous curatelle ne peut en principe les accomplir qu’avec l’assistance de son curateur (article 467 du code civil).
NB : Le décret n° 2008-1484 du 22 décembre 2008 définit les actes d’administration et les actes de disposition et liste plusieurs exemples de ces actes.
L’assistance du curateur se manifeste par la « double-signature » des actes. Le curateur appose sa signature à côté de celle du majeur sous curatelle.
Tutelle: la personne est totalement représentée par le tuteur
L’alinéa 3 de l’article 440 du code civil dispose que « La personne qui (…) doit être représentée d’une
manière continue dans les actes de la vie civile, peut être placée en tutelle ».
La tutelle est une mesure de protection pour les personnes dont l’état de santé – plus détérioré qu’en curatelle – les empêche d’agir seul et nécessite donc qu’un tiers les représente pour la réalisation des actes de la vie civile.
En d’autres termes, la tutelle est une mesure de représentation du majeur protégé (article 473 du code civil).
En tutelle, la répartition des actes est donc la même qu’en curatelle, mais ses conséquences sont différentes :
- S’agissant des actes d’administration et des actes conservatoires (les actes les moins importants), le tuteur représente seul le majeur protégé (il agit seul au nom de ce dernier).
- S’agissant des actes de disposition (les actes les plus importants), le tuteur représente le majeur protégé, mais avec l’autorisation du juge des tutelles ou du conseil de famille (article 505 du code civil).
Mais le majeur protégé conserve en principe une sphère protégée d’actes qu’il peut réaliser lui-même (articles 457-1 à 463 du code civil).
Exemple :
- reconnaissance d’un enfant
- consentement donné à sa propre adoption ou à celle de son enfant
- décisions relatives à la personne
- choix du lieu de résidence
- choix des relations personnelles
- etc…
La curatelle renforcée: proche de la tutelle
Gestion des ressources financières
En tutelle, le tuteur perçoit les revenus du majeur protégé. Il règle ses charges et lui verse une somme, généralement hebdomadaire, pour ses dépenses de la vie quotidienne.
En curatelle simple, le majeur protégé gère lui-même ses revenus mensuels : il les perçoit puis les dépense librement.
Cependant, la curatelle simple n’est pas la curatelle la plus répandue. En effet, en 2022, il y a eu seulement 2509 curatelles simples contre 29 426 curatelles renforcées[1] !
Or, l’article 472 du code civil dispose qu’en curatelle renforcée, le curateur « perçoit seul les revenus de la personne en curatelle sur un compte ouvert au nom de cette dernière » et « assure lui-même le règlement des dépenses auprès des tiers et dépose l’excédent sur un compte laissé à la disposition de l’intéressé ou le verse entre ses mains ».
En pratique, en curatelle renforcée, le curateur s’occupe de :
- Percevoir les revenus du majeur protégé (salaire, allocations, indemnités, etc.) ;
- Les utiliser pour régler les charges du majeur protégé ;
- Verser l’excédent au majeur protégé, qu’on appelle « argent de vie ».
Ainsi, pour la gestion des ressources financières, il existe peu de différences entre tutelle et curatelle renforcée.
Gestion des biens et du patrimoine
Les règles de gestion du patrimoine du majeur sous tutelle sont prévues aux articles 496 à 515 du code civil.
Ces dispositions prévoient deux principales obligations :
- L’obligation du tuteur de réaliser un inventaire des biens du majeur protégé lors de l’ouverture de la mesure de tutelle (article 503 du code civil) ;
- L’obligation du tuteur d’établir chaque année un compte de sa gestion, qu’il doit notamment envoyer au majeur protégé (article 510 du code civil).
Or, l’article 472 du code civil dispose que lorsque la curatelle est renforcée, elle est soumise aux articles 503 et 510 à 514 du code civil. En d’autres termes, cela signifie que la curatelle renforcée est soumise aux mêmes obligations d’inventaire et de comptes de gestion que la tutelle.
Ces obligations alourdissent considérablement le travail du curateur et du tuteur, qu’ils soient familiaux ou professionnels. Il s’agit toutefois d’une mesure de précaution et de protection des majeurs protégés, par définition vulnérables. En effet, les curateurs et tuteurs disposent d’un certain pouvoir sur les comptes des majeurs protégés. Il convient de s’assurer qu’ils utilisent ce pouvoir uniquement dans l’intérêt de ces derniers.
Attention: Il convient d’être particulièrement vigilant lorsqu’un curateur ou un tuteur familial est nommé. Ces obligations doivent être scrupuleusement respectées. En effet, en cas de violation de ces obligations, le juge des tutelles pourrait remplacer le curateur ou tuteur familial par un professionnel.
[1] Références Statistiques Justice 2023, Sous-direction de la Statistique et des Études, Ministère de la Justice
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